Depuis
le fond de la mare, comme il le dit lui-même, il regarde vers la
surface… depuis quelques années maintenant dans un mélange de nostalgie
magnifique et de désespoir amusé. De nouveau assigné à résidence,
Stephen Jones, artiste précédemment connu sous le nom de Babybird,
l’homme aux 400 chansons lo-fi, a initié une manière unique de partager
de la musique avec ses fans en mettant bandcamp en ébullition régulière.
Le bonhomme sort depuis plus de
deux ans un album toutes les deux semaines, parfois trois ou quatre
d’une traite, majoritairement instrumentaux, même s’il s’est remis au
chant il y a peu, multipliant les pseudos et les noms différents mais
avec un unique point commun : il n’y a aucun déchet dans ce qu’il
produit. Tout est bon, comme dans le cochon. Indispensable et volatile
comme l’air. Opération zéro déchet et pop dorée : cÅ“urs brisés assurés,
larmes aux yeux garanties. Ceux qui le fréquentent en ont fait leur
source quasi exclusive d’alimentation musicale, peinant à digérer
l’excellence et la profusion des livraisons.
Sa dernière Trilogie de l’Outsider (trois albums en deux semaines) pourrait lui valoir une résurrection médiatique en bonne et due forme, si seulement quelqu’un l’écoutait quelque part. L’homme est de retour sans esprit de revanche et sur ce qu’il n’a jamais cessé de faire : ciseler de petites compositions pop, brillantes, spirituelles et irrésistibles, avec un piano et des rêves, tandis que ses gamins sont à l’école. Ses albums lo-fi fêteront leurs 20 ans cette année et il se pourrait bien qu’il organise quelque chose pour l’occasion maintenant que son ancien manageur est de nouveau à ses côtés. Bienvenue dans le monde merveilleux et cruel de Monsieur Jones. Bienvenue dans l’univers impitoyable mais encore magique de la pop 3.0.
Vous avez sorti trois albums
originaux ces dernières semaines, quelques souvenirs d’archives de
Babybird (un petit événement en soi pour ceux qui vous suivent) et vous
ne semblez pas prêt de vous arrêter. Est-ce qu’il y a une stratégie
autre que suicidaire dans cette débauche de sorties ?
Je cours d’une certaine façon à ma
propre perte en sortant mes disques ainsi mais j’ai le mérite d’y aller
en conscience. C’est comme faire un doigt d’honneur aux bonnes manières
et au mode de sortie traditionnel de la musique. Je préférerais sortir
tout cela en CD et en vinyle mais il n’y a plus d’argent pour le faire.
J’ai donné par le passé. J’ai connu l’époque où c’était encore possible.
Mais cette fois-ci, c’est beaucoup plus marrant. Et je peux payer mes
factures tout en ne cessant jamais de composer.
En trois ans, vous avez dû
écouler plus de 400 morceaux dont la majorité était des instrumentaux.
Comment est-ce que vous vous assurez de la qualité de votre production
dans une telle profusion? Est-ce que vous pouvez nous décrire cette
nouvelle sorte d’artisanat où le producteur livre directement et sur une
base quasi hebdomadaire la musique au consommateur ?
Sans vouloir en faire trop, cette
manière de fonctionner est probablement ce qui existe de plus efficace
pour continuer à composer de la musique et à la partager sans être
confronté au cauchemar de la production et des calendriers de sortie. La
musique sort directement de l’atelier, directement de ma bouche, de mes
doigts, de ma tête. Et elle est chez vous. Ma vie pour le moment, ce
n’est pas partir en tournée ou répéter avec un groupe. Depuis deux ans,
je travaille comme tout un chacun en journée. Je me lève le matin et je
travaille. J’y suis toute la journée jusqu’à ce que les gamins rentrent
de l’école. Je suis libre de faire de la musique. Je travaille vite mais
je sais quand il faut abandonner une idée et enchaîner sur autre chose.
Vous êtes malgré vous en train
d’inventer quelque chose. Ces sorties rapprochées sont inédites à cette
échelle et sur une telle durée. Est-ce que c’est viable et quelque chose
que vous recommanderiez ?
Cela permet de payer quelques factures
mais je n’ai pas assez d’argent pour promouvoir mon travail. Tout repose
sur twitter et les réseaux sociaux. Twitter, c’est un peu de la merde.
Les gens ne vous suivent pas parce que vous êtes musicien, pas pour la
musique. Ce ne sont que des voyeurs pervers…. Ah ah… je mets à part bien
sûr le petit groupe de personnes adorables qui me suivent et qui
téléchargent et paient pour ce que je fais. Ce sont eux qui me
permettent de continuer et de viabiliser ce dispositif. Mais mon but
principal aujourd’hui est bien de me sortir de là . Et j’ai quelques
projets en ce sens.
Sur Twitter, vous êtes souvent
sarcastique quant à l’anonymat dans lequel vous Å“uvrez aujourd’hui.
Est-ce que vous êtes déçu d’en être revenu au point de départ ou déçu
tout court par la façon dont a évolué le monde de la musique ?
Oui, c’est merdique, il faut dire la
vérité. Mais j’espère chaque jour que je vais pouvoir me dégager de ce
système de contraintes. J’ai récemment renoué avec mon ancien manageur
et cela m’a redonné beaucoup d’énergie, comme si j’avais laissé les
choses inachevées et que nous allions nous y remettre ensemble. J’avais
eu ce sentiment avec Babybird il y a quelques années et
cela m’avait permis alors de clôturer le projet dignement et en
musique. Je confirme que Babybird est bien un projet bouclé.
La plupart des musiciens de « 2nde
division » se plaignent de n’avoir plus qu’un accès restreint aux
sorties physiques et, lorsqu’ils arrivent à sortir un disque, que
celui-ci ne s’écoule plus qu’à quelques centaines d’exemplaires. Est-ce
que cette situation est renforcée chez vous par le fait (comme d’autres)
d’avoir connu une situation historique très différente ? Y a-t ’il une
question de génération qui rend l’adaptation plus compliquée ?
Je suis assez loin de ces débats. Je vis
dans ma bulle. Personne ne sort des disques comme je le fais
aujourd’hui, même si cela a tendance à me hanter car sortir autant de
musique et de disques ne laisse pas vraiment aux gens qui apprécient ce
que je fais le temps de digérer les choses. Lorsque je sors un disque le
vendredi soir, la durée de vie de l’album est globalement d’une
semaine. Personne ne l’achète après ça ou quasiment personne. Lorsque
c’est à sec, il est temps de sortir à nouveau quelque chose. C’est
amusant et dramatique à la fois : la musique est excellente et je tiens
une sorte de registre, une archive où je classe toutes mes futures
parutions. Je peux garantir qu’il n’y a aucune merde, rien à jeter. Vous
pouvez trouver que je suis prétentieux ou vantard mais écoutez ce que
je fais. Ce n’est pas une blague.
Jusqu’à présent, mes succès passés m’ont
permis de continuer mais cela risque de s’essouffler assez vite si je
ne trouve de nouvelles voies pour sortir de cette compulsion de sorties
sur bandcamp.
Certains s’en sortent en
tournant beaucoup, dans de petites salles, des bars, devant peu de monde
et en jouant pour des nèfles. Cela fait quelques années que vous n’avez
pas joué sur scène. Est-ce que cela vous manque ?
Je me languis de remonter sur scène.
J’ai pris un plaisir énorme lors de la dernière tournée de Babybird
(NDLR : en 2011, immortalisée par un DVD The End Is Here – Unison Group)
Je préfère de toute façon évoluer dans de petites salles. J’ai joué par
le passé devant 40 000 personnes et j’en ai gardé le souvenir d’une
expérience complètement foireuse. Il y a des barrières. Une sécurité
invraisemblable. Tout cela m’a toujours semblé effrayant et complètement
hors de proportion. Je sais bien que c’est là désormais qu’est
l’argent. J’ai toujours été calamiteux quand il s’agissait de faire de
l’argent. Mais sait-on jamais. Il y a des discussions pour des concerts
en ce moment même. Mais tout ce qui me concerne est souvent très très
bizarre. Alors je verrai bien comment ça évolue.
Votre premier album est sorti en
juillet 1995. Il y a 20 ans cette année. A cette époque, vous étiez
connu comme le gars qui a composé des centaines de chansons dans sa
chambre. D’une certaine façon, vous êtes revenu au point de départ. Je
suppose que vous appréciez l’ironie de la situation….
Évidemment, la plupart des gens
commencent chez eux, dans leur chambre, ou à l’hôtel, avec un dictaphone
ou du petit matériel, sans beaucoup de moyens. J’ai adoré et j’adore
écrire des démos et les mettre directement sur la table. C’est quelque
chose d’intime et de privé. Enregistrer des chansons dans un studio avec
un groupe implique de faire tant de compromis que je ne peux pas
fonctionner ainsi. Ce n’est pas naturel. Je ne veux pas composer les
chansons de Babybird ou de ce qui viendra après de cette manière. J’ai
33 démos qui attendent d’être enregistrées correctement. La musique de Black Reindeer, Deluder et Arthritis Kid
(NDLR : ses pseudos actuels) est plus personnelle et poursuit d’autres
finalités. C’est pour cette raison que j’ai besoin d’en garder le
contrôle exclusif. Personne ne peut mettre la main dessus ou y ajouter
quoi que ce soit.
Avez-vous prévu quelque chose de spécial pour fêter le 20ème
anniversaire de vos enregistrements lo-fi, en plus d’avoir sorti un
certain nombre d’inédits récemment ? Des concerts ? Les rejouer en
intégralité peut-être ? Ou une performance d’art contemporain ?
J’ai des tas d’idées pour une
performance d’art contemporain et de musique. C’est de là où je viens :
le cinéma et l’art performatif. Les clips que je mets en ligne sur
youtube seront probablement intégrés à ce que j’imagine. Il y aura de la
musique live bien sûr mais probablement avec un chanteur moins dingue
et mégalo que pour le Babybird de l’époque. Des projections qui seront
plus en phase avec l’univers musical. Le manque de respect pour ce que
j’ai fait est l’un des péchés pour lequel je plaide coupable. Et puis il
y aura de manière imminente la sortie d’un 7ème album lo-fi, un album
physique cette fois. Cela vient. Et probablement aussi quelque chose
autour de ce 20ème anniversaire des enregistrements originaux eux-mêmes.
Ce qui est saisissant avec ces
deux premiers albums d’inédits “missing lo-fi”, sortis récemment, c’est
que les chansons que vous avez laissées de côté à l’époque étaient
toutes épatantes. Comment est-ce que vous avez composé les sorties de
1995 et des années suivantes ? Il y avait un sens caché ou était-ce un
peu aléatoire ? Chaque LP avait sa tonalité, une sorte de thématique
fédératrice. Il y avait quelque chose d’autre pour vous ?
J’ai l’impression qu’on me parle d’une
première vie, une autre vie. Comme si je m’exprimais pour le compte
d’une autre personne. Je suis parti en Nouvelle Zélande sur un gros
paquebot grec à l’âge de quatre ans. Je connais ce gamin pour l’avoir vu
en photo mais je n’ai plus aucun lien avec lui, plus aucun vrai
souvenir. Je suis persuadé qu’on vit des vies multiples et différentes
et qu’elles ne sont tenues ensuite que par des souvenirs reconstitués et
imprécis. C’est le rapport que j’ai à ces vieux albums. Je peux
réécouter une chanson qui me ramène physiquement dans la chambre et la
position dans lesquelles je l’ai enregistrée. Mais pourquoi est-ce que
celle-ci était sur l’album plutôt qu’une autre ? Je suis incapable de
répondre à rebours. Je me souviens que j’ai passé beaucoup de temps au
chômage et que je les réécoutais et les réécoutais continuellement. Je
crois que la composition des albums se faisait en accord avec mes
managers qui étaient de vieux amis et en fonction des cassettes qui
traînaient là à ce moment-là . Des gens en empruntaient et certaines ont
été volées. Je crois que mes préférées sont sorties ici ou là . Ce qui
compte finalement, c’est le cycle de vie propre à ces morceaux qui a été
initié et saisi à travers leur parution.
Vous avez livré une version démo de You’re Gorgeous sur le premier volume des Missing Lofi albums.
Pourquoi est-ce que ce titre ne figurait sur aucun CD lo-fi ? Et
comment avz-vous réalisé ensuite que cette chanson avait un tel
potentiel commercial, et maléfique ? Est-ce que vous avezs déjà imaginé
votre vie sans ce morceau ?
Je l’ai dit par la suite : c’était une
idée et un choix de la maison de disques. Je suis quelqu’un de très
facile à vivre et j’ai suivi le mouvement. Le groupe et moi savions que
ce n’était pas la meilleure chanson du tout. Mais il s’est passé quelque
chose en studio. Un producteur a gonflé le son et les maisons de disque
ont accouru avec la bave aux lèvres. Ah ! Ah ! C’est chouette que ce
morceau m’ait apporté et rapporté l’argent qu’il m’a rapporté. Sur le
plan artistique, You’re gorgeous m’a fusillé.
Il y a cette chanson Heat of Apollo. Elle démarre par un cover du In Heaven des Pixies, n’est-ce pas? C’est à ma connaissance votre seul embryon de reprise…
Oh non, ce n’est pas du tout une reprise. Et je n’ai jamais écouté les Pixies de toute ma vie. J’étais plutôt dans le post punk anglais : Joy Division, Scritti Politti, Subway Sect, The Buzzcocks, Magazine…
Lorsqu’on écoute vos vieux
morceaux, on se dit qu’ils ne sont pas si différents des instrumentaux
que vous avez sortis ces deux dernières années sous le nom de Black
Reindeer. La musique a toujours été pour vous au centre du jeu ?
Oui, les bandes originales, c’est ce qui
constitue le lien entre tout ça. J’ai commencé par là et j’y suis
revenu. Je composais des accompagnements pour des pièces de théâtre, ce
genre de spectacles. J’ai commencé à chanter parce que j’étais à la
recherche d’un autre instrument et pas tellement parce que je voulais
exprimer quelque chose par des mots. La voix était une sorte de corde
comme une autre. Un choeur fantôme. Je n’ai jamais eu l’intention de
devenir un chanteur, ce genre de connard qui passe son temps à se
peigner devant le miroir de la chambre.
Cela reste paradoxal : vous êtes
connu pour la qualité de vos textes et de votre voix, mais vous avez
toujours eu l’air gêné avec cette position de chanteur. Vous avez
beaucoup utilisé les effets vocaux, les turning boxes, vous en avez
rajouté dans le côté crooner, en essayant d’éviter votre vraie voix.
Est-ce que chanter est devenu plus naturel pour vousavec le temps ?
Oui, c’est devenu complètement naturel
et j’adore chanter. Tu te mets à hyperventiler et tu pénètres dans un
autre espace, littéralement. C’est comme regarder Nusrat Fateh Ali Khan.
Je transforme ma voix essentiellement pour les bandes originales
maintenant. J’ai appris à mieux utiliser ma voix et surtout à éviter
cette manière arrogante et cabotine de chanter assez merdique qui était
la mienne à l’époque des lo-fi et d’ Ugly Beautiful (NDLR : 1er album hi-fi du groupe, porté par le single You’re Gorgeous). L’album There’s Something Going On
a été le déclic pour moi. Plus de blagues, de second degré. Juste un
chant sérieux et sincère. Cela a été un tournant important pour moi.
Vous sortez tellement de choses
qu’il me faudrait 100 pages d’interview pour discuter de chacune de vos
productions. Je voulais juste parler d’Arthritis kid. Ce nom est avec
vous depuis bien longtemps, contrairement à Black Reindeer. Est-ce que
cet album a une signification particulière pour vous ?
J’adore Arthritis Kid. C’est ce qu’il y a
de plus proche de la musique que j’écoute. Méditatif. Lorsque j’écris
de la fiction, je n’écoute que ce genre de choses : des bandes
originales de films, Olafur Arnalds, Explosions In The Sky, Hammock, Eluvium, A Winged Victory For The Sullen etc. J’aime aussi Saleen Zahoor. Je viens d’acheter le nouveau Sufjan Stevens. Craig Mack.
Cet album n’est constitué que de
5 morceaux mais c’est à mon avis la musique la plus merveilleuse que
j’ai entendue depuis longtemps. C’est triste, très mélancolique mais
d’une beauté époustouflante. Cela me donne envie de pleurer mais en même
temps d’espérer…
Ce que tu dis me fait infiniment plaisir. C’est exactement l’intention. Merci. Le numéro 2 devrait sortir bientôt.
Comment est-ce que vous organisez la vie de vos différents pseudos et alias ? Vous ne craingnez pas de devenir schizo ?
Deluder fait de la dance. Trucker
fait de la dance psychédélique pour les routiers. Ah ! Ah ! Je me sers
de ces différentes idées pour marquer le type de musique ou le style que
j’explore. Mais ce n’est pas planifié ni prédéterminé. Les projets sont
baptisés après composition. Et non, ça ne fait pas peur !
Quel est le programme pour les prochains mois ?
Pas mal de choses. Je refais équipe avec
mon ancien manageur et il y a de nombreuses choses sur la table. Même
une comédie musicale. Des musiques de films. J’ai toujours voulu
travailler là -dessus mais c’est comme avoir le feu vert définitif pour
une série TV, on les présélectionne et puis personne ne s’en sert. Mon
idée aujourd’hui, c’est que je dois continuer à sortir ma musique et
qu’au final, quelque chose finira par émerger du petit petit monde
qu’est Bandcamp, qu’un morceau ou un album entier parviendra Ã
s’échapper de ce monde vide et creux des réseaux sociaux. Bien sûr je
veux revenir et jouer sur scène. Cela fait plus de trois ans maintenant
que je n’ai pas donné de concert.
Comment est-ce que vos enfants
voient leur père aujourd’hui ? Est-ce qu’ils vous considèrent comme un
musicien ou quelqu’un qui reste à la maison toute la journée et fait de
la musique sur internet ?
Ils me prennent pour le gars bizarre
dans la chambre d’à côté qui pianote toute la journée sur un mini piano
USB, avec son casque sur les oreilles. Ça ressemble à ça. Mais je
travaille surtout pendant qu’ils sont à l’école. Je suis très frustré
par le fait que mon jeune fils ne m’a jamais vu sur scène. La plupart de
leurs copains ont l’air de savoir qui est Babybird et la plupart des
profs également. Ils n’en sont donc pas encore au stade où ils seraient
gênés de dire quel est mon boulot. C’est déjà ça !
Est-ce que vous avez bouclé votre troisième roman finalement ?
L’ossature est prête mais j’ai juste
besoin de temps pour… l’écrire. Le temps ? Où est le temps? Où est-ce
qu’il disparaît? Où va-t-il ?
ENGLISH
Stephen Jones, a king without a kingdom
From the bottom of the pond, as
he himself says, he is looking up… for a few ugly beautiful years. Back
to his home studio room, Stephen Jones, the man formerly known as
Babybird and his 400 lo-fi songs, is experiencing a very unusual way to
share his music through a bandcamp frenesy. There is a LP out almost any
two weeks, sometime three or four in a row, mostly instrumental though
he has started singing again recently, under different names but with a
common point which is: everything he composes and sings turns into pop
gold, breaking hearts and bringing tears to the eyes. His last Outsider Trilogy
(three full LPs in two weeks time) should owe him a traditional
resurrection fairytale, were anyone listen to it. People who follow him
faithfully have made him their (almost) exclusive source of musical food
and listen to his music like happy zombies wishing for more every day.
The guy is back with no
vengeance but what he never did cease to do: crafting witty,
irresistible pop songs with a piano and a dream, while his kids are at
school. His lo-fi work will have 20 years this summer and there is
something on the run to celebrate with his old manager back by his side.
Welcome to the marvelous and cruel world of Mr Stephen Jones. Welcome
to insane 3.0 pop universe.
You’ve published two new LPs
since we have planned this interview. And you’ve resurrected Babybird’s
basement tapes which is a huge event for your faithful fans all over the
world…. Is there any plan or strategy behind your compulsive music
production?
It’s a self-defeating plan but at least I
am aware that it is. It’s 2 fingers up to the conventional stale normal
way of releasing. I would prefer to release on cd/vinyl but there is no
money. This way means I can pay bills and keep recording. I did it the
proper way once – this is more fun.
You’ve offered people something
like 400 songs these last 2 years. Mostly instrumental music. How do you
work so quick and get sure you don’t put out music which doesn’t
deserve it? It seems like craftsmanship: music directly from producer to
consumer….
Yes! and without sounding too up myself I
feel like this is the closest to releasing work that is directly from
my fingers mouth and head, without the nightmare of over production and
release schedules. My day at the moment doesn’t involve touring or
working with a band so for the last 2 years i work in the day like
everyone – kids at school – i have freedom to do the music. I work fast
but know when to stop or abandon, then try something else.
It seems you are somehow
inventing a new musical economy. A delivery every month/week or so.
Bandcamp direct access and what I guess is a faithful and tight
audience. Is this a model you would recommend? Can you live on it as a
professional musician?
It pays a few bills but no I have no
money for press so it relies on twitter etc. But twitter is shit –
people don’t follow for the music – they are perverted voyeurs haha
except for my lovely band of folk who do download and keep it going. My
main aim now is to get to a break out from that and there are plans to
do that.
On your twitter account, you are
sometimes sarcastic about the anonymity you are now working in. Are you
disappointed by how things have turned in the music business or just
only by your personal return to this “confidential state”?
Yes it’s shit to be honest but everyday i
hope to move away from those constraints. I have my old manager back
and we feel re-energised like babybird (now gone) was unfinished
business.
Most musicians complain about
the situation for “2nd league” artists who have restricted access to
producing physical Lps and when they do don’t sell more than a hundred
ones. It is more disturbing for people like you who have known the big
record deal era. Is there a generation gap between guys like you and
young acts who have immediately adapted to this new world ?
I’m not part of any of that – I’m in my
own bubble. No one releases as i do and it comes back to haunt you
because releasing so much doesn’t give people time to digest. But when i
release on a friday evening the albums have a shelf life of a week at
the most. Sales dry up, so release again. But i believe the music is
great and i have an archive of future releases, none of it shit. God
that sounds arrogant but just listen to it – it’s no false claim.
My past success allows me to carry on
too, but that will dry up soon if new avenues aren’t found beyond this
obsessive bandcamp hobby.
Some try to survive by touring
intensively, back to the pub circuit mostly, small audiences, small
fees. You haven’t done any live concert since last Babybird tour a few
years ago. Do you feel like playing live again ? Could you go back to
touring in modest conditions ?
Desperate to play again. I loved the
last tour enormously. I genuinely prefer tiny venues after playing to
40,000 etc – my experience of that was utter shit. Barriers/security
guards. Like a power trip of horrendous proportions. I know that’s where
the money is made but I’ve always being a disaster making money. Live
plans are being made. But plans in my life are frigging weird. maybe
they’ll happen.
Your first known works have 20
year this year. First album in July 1995. At the time, you were known as
a guy in his room with hundreds of hidden gems. Seems to me things
haven’t changed that much. You must fancy the irony of the situation…
Surely most people start at home, or in
hotel, a dictaphone, personal private and on your own. Making up songs
in a room with a band must involve so much compromise, which is bad, i
can’t do that. I have always loved writing the demos and then taking it
to people. I am not interested in writing Babybird (or whatever comes next) songs that way. I have 33 demos that will get the proper treatment. My Black Reindeer, Deluder, Arthritis Kid music is more personal and for a different purpose, which I need full control of. People can’t stick their fingers on that.
Have you planned a special
celebration except from putting out those “missing lofi” lps on
bandcamp? I’ve always fantasized on a 5-original lofi recordings live
rendition. Has anyone suggested you to tour with those records again and
do one of those “3 hour” complete rendition of your material? A special
event ? Contemporary art performance ?
Many ideas for an art event. That’s
where i started in performance art and film. The films I release on You
tube will eventually form part of an art show, and the live music will
follow suit with less of a crazed insane lead singer as was involved
with Babybird. Film projections, more respectful of the music. Lack of
respect – a sin of which I am hugely guilty. A 7th lo-fi album with a
physical release is imminent. As a 20 year marking of the original lo-fi
is planned.
What is amazing with those 2
“missing lofi” lps is the extreme quality of tracks. Any song there
could have found its place on one of those early recordings? How did you
collect the song into each cd at the time? Each lp from a distance has
its own characteristics though it still is difficult to say I was Born A Man is about this and The Happiest Man Alive is about that… Was there a kind of secret classification in your head with those songs ?
It’s almost like another lifetime. Like
another person. I went to New Zealand on a Greek ocean liner when i was
4. That person is in the photographs but I have no bond with that
person. We live many different lives held together with inaccurate
memories. Hence my unclear recall of those early lo-fi albums. A certain
song will transport me back to the room i was in when it was made, but
as far as songs that made it, it was a lot of time on the dole
unemployed and listening over and over; and choices made very much with
help from my managers who were old friends and cassettes that people
borrowed and stole. Favourites surfaced. The definite thing was the life
cycle in the titles.
There is a strange early version of you’re gorgeous on missing lofi part one.
Why wasn’t it initially on any lofi cd? How did you realize this song
had this tremendous (and malevolent!) commercial potential? Can you
imagine how things would have been without this hit ? (sorry about this
“you’re gorgeous” question!)
As I’ve said a lot, it was our record
company’s idea i think. I’m easy going and went with the flow, though
the band knew full well it wasn’t the best song at all. It sort of
happened in the studio, you get some slick producer to grease up the
song and record companies come a flocking, all salivating. haha. Glad it
did what it did though financially. Artistically it fucked me.
Can you tell us something about
“Heat of Apollo”? It starts with a cover of In Heaven from the Pixies,
isn’t it? Is that your only cover work ever? Were you into the Pixies at
the time?
No I’m afraid not, not a cover, never
listened to the pixies. I was mostly into post punk english bands, joy
division, scritti politti, subway sect, buzzcocks, magazine…
You’ve resurrected those lofi
recordings and also a few instrumental cassette works which are not that
different from your Black Reindeer work. Was it always something about
music and music only for you ?
Not sure if I’m answering you correctly
but soundtrack is the link and that’s how I started way back – scoring
for theatre shows etc. Singing only started for me as another
instrument, no words. blended into the strings etc. ghostly choral, etc.
i had no intention of being a singer, some twat with a hairbrush in a
bedroom mirror.
What is paradoxical with you is
though you are well known for the quality of your lyrics and your voice,
you’ve always seemed a bit troubled by the idea of singing yourself:
you’ve used distorted voices, effects, “over-crooning”, trying to escape
your regular voice. Isn’t singing something natural for you after all
those years?
Yes its completely natural – I love it. You hyperventilate, or shoot off into another plain literally – like watching Nusrat Fateh Ali Khan.
Distorted voices and samples are for soundtracks. The thing I have
learnt not to do is the arrogant shit from the lo-fi and ugly beautiful.
Theres something going on was a break through. No jokes, serious
singing. Big learning curve for me.
Though it is difficult to
discuss precisely your music as it would need a 100 page long interview,
I would like you to talk about the Arthritis kid lp. It has always been
one of your early aliases, unlike Black Reindeer. The Lp is maybe the
most melancholic of all. Has this Arthritis Kid work a special meaning
to you?
I love Arthritis Kid. It gets closest to
the music I’d actually listen to. Meditative. When I am writing novels
its closest to what i would listen to – film soundtracks etc. Olafur Arnalds, Explosions in the sky, Hammock, Eluvium, A winged victory for the sullen etc. I also love Saleen Zahoor. I’ve just bought the new Sufjan Stevens. Craig Mack.
This album is only 5 songs but
is to me the most marvelous thing I’ve heard for a very long time. It is
both sad and beautiful. It brings tears and hope at the same time.
Brilliant ! that was the plan. Thank you. Number 2 is coming soon.
How do you organize your
different aliases in your head? There is Deluder which seems to me…
well… more like an extroverted version of you : dancing influence maybe ?
Trucker which is… well… I don’t know. Do you really live inside those
aliases?
Deluder is dance. Trucker is quasi
psycho dance trucking music haha. Yes they just banner the different
type/style of music but they are most definitely planned that way – it’s
not flippant
What is the plan for the coming months? You’ve talked about a physical release or a box set sometime?
Now I am with my old manager, there are
various plans. Even a musical. Film music. These things always hover
over me, but like getting a tv show green lighted, they get picked up or
dropped.
My philosophy is that if I keep going
keep releasing something will stick or make it out from beyond the tiny
world of Bandcamp and the utter vacuousness that social media has
become. Live etc must happen again – it’s obscene that it’s been over 3
years.
How do your kids see their
father as a musician? Someone who stays home and do music for the
internet? How do you explain them what your job is?
I’m the weird man in the box room
tiptiptapping on a 12 inch USB piano – with headphones on, thats what it
sounds like. but mostly it goes on when they are school.
I find it very frustrating that my
little boy has never seen me play live. Most of their friends seem to
know about babybird as do some of the teachers, so they’re not
embarrassed to pass on what i do, so that’s something.
Is your new novel finally written?
The skeleton is all worked out, just needs writing but where’s the time, where does it go?